Un code routier ne dit pas tout. Derrière chaque moto lancée sur l’asphalte, un geste s’échange, discret mais chargé de sens : le fameux « V » des motards, salué d’un simple mouvement de la main, loin de toute règle écrite. Ce signe, absent des manuels et ignoré des auto-écoles, a pourtant traversé les générations, se transmettant de motard en motard comme un secret bien gardé.
Le « V » n’est pas un langage universel partagé par tous les motards du globe. En France et dans quelques coins d’Europe, il s’impose pourtant comme une tradition. Ni codifié ni obligatoire, ce salut se glisse dans la circulation, adopté naturellement, repris sans formalité par celles et ceux qui partagent la passion de la route.
Au fil des années, ce geste a su préserver son identité, même s’il est parfois confondu avec d’autres signes. Selon les pays, selon les clubs, il se décline, s’adapte, mais continue d’incarner ce lien unique qui unit les amateurs de deux-roues. Les époques passent, le principe demeure : un signe qui parle de fraternité, de respect, de solidarité, bien au-delà des mots.
Le V des motards, un symbole universel de fraternité sur la route
Ce V, deux doigts levés, dépasse la simple marque de politesse. Sur les routes, ce salut devient une déclaration silencieuse, chargée de respect et d’estime. Ce n’est pas un geste anodin : il scelle l’appartenance à une communauté, celle des motards, unis par la même passion du voyage et de la machine.
Le code n’a pas de frontières. De la France à l’Allemagne, de l’Italie à la Belgique, jusqu’aux États-Unis ou au Japon, là où la culture deux-roues s’épanouit, le V circule. Un motard croise un autre motard ? Le geste s’impose, tissant une complicité instantanée, comme un clin d’œil entendu sur la route. Derrière la visière, un sourire, parfois invisible, mais toujours présent.
Ce salut, tantôt discret, tantôt affirmé, s’ajuste selon l’humeur, la météo, la situation. Certains lèvent à peine la main, d’autres marquent le coup. Il traverse les générations, reliant les anciens et les plus jeunes dans une même fraternité. Un simple mouvement, et la solidarité prend forme, peu importe la cylindrée ou la marque.
D’où vient ce geste ? Entre légendes et réalité historique
Les origines du V motard se mêlent aux récits et aux souvenirs. Certains racontent que le signe aurait vu le jour dans les années 1940 : des soldats, tout juste rentrés de la Seconde Guerre mondiale, auraient ramené ce V de la victoire, cher à Winston Churchill. Sur les routes américaines, les premiers groupes de bikers l’adoptent, donnant naissance à un symbole de fraternité et de victoire sur l’adversité.
D’autres préfèrent une version plus mécanique. Les pionniers de Harley-Davidson, William Harley et Arthur Davidson, auraient instauré ce salut lors de leurs escapades, forgeant une culture où le geste devient signe de reconnaissance et de respect entre passionnés. Les ateliers bruissent de cette légende, transmise de génération en génération.
La piste sportive existe aussi. Dans les années 1970, un certain Barry Sheene, champion du monde de moto, n’hésite pas à saluer la foule et ses adversaires d’un V, souvent immortalisé sur les images de l’époque. Rapidement, ce geste quitte les circuits pour gagner la route, adopté par les motards du quotidien comme par les pilotes chevronnés.
Qu’elle soit militaire, industrielle ou sportive, l’origine du V échappe à toute certitude. Mais une chose demeure : saluer d’un V, c’est s’inscrire dans l’histoire vivante de la communauté motocycliste, affirmer son appartenance à une famille où la route est le terrain de jeu, et la solidarité, une règle tacite.
Pourquoi le V reste un signe fort de solidarité aujourd’hui
Sur les routes françaises comme sur les grands axes européens, le V ne faiblit pas. Il continue d’unir tous ceux qui vivent la moto comme une expérience collective, loin des individualismes. Ce signe, lancé à la volée, traverse les générations, les styles et les modèles. Entre motards, il n’y a plus de barrières, juste un sentiment de fraternité immédiat.
La route isole, parfois. Mais le V, lui, relie. Ce geste, simple à première vue, porte en lui l’assurance d’être reconnu, compris, soutenu. Il dit la vigilance, l’engagement, le respect de ceux qui partagent les mêmes risques et les mêmes plaisirs. Lorsque deux motards se croisent, ce salut devient le trait d’union d’une communauté qui ne laisse jamais l’un des siens de côté.
Pour mieux comprendre la portée de ce geste, voici ce qu’il véhicule sur la route :
- Respect partagé : la fraternité s’exprime ouvertement, rappelant que chacun appartient à une même histoire.
- Reconnaissance automatique : le V joue le rôle d’un mot de passe, celui qui ouvre la porte à une complicité spontanée.
- Assurance d’entraide : en cas de pépin, le motard sait qu’un autre s’arrêtera, prêt à donner un coup de main.
Ce petit signe, répété des milliers de fois chaque année, porte la mémoire des pionniers, la force du collectif, la volonté de préserver des valeurs communes. C’est souvent par ce V que commence la sécurité sur la route : un rappel, à chaque rencontre, que la fraternité motarde ne s’efface jamais, même lorsque le voyage semble solitaire.